Tout ce que vous voulez
d’Alexandre de la Patellière & Matthieu Delaporte
Ce spectacle est modifié par la prolongation des représentations de Sentiments provisoires
du 3 au 31 décembre
Nous étions si heureux de vous retrouver, de vous revoir nombreux et courageux pour reprendre le fil de l’histoire. Hélas, cette deuxième pause imposée nous oblige, cette fois encore, à se réinventer et à réorganiser la saison.
La création de Tout ce que vous voulez, prévu en décembre, est trop risquée d’autant plus que nous ne savons toujours pas quand nous pourrons vous accueillir à nouveau. Le spectacle est donc reporté à l’année prochaine. Cette décision fut difficile à prendre et lourde de conséquences pour les artistes ainsi que pour vous, fidèle public, mais les conditions actuelles nous y obligent.
Alors, pour rester positif nous avons choisi de prolonger Sentiments provisoires dès une réouverture possible et pour les fêtes. Certains d’entre vous l’ont déjà vu mais vous aurez peut-être envie de revoir Marc, Félix et Hélène et d’y emmener des amis. Pour les autres, encore nombreux, ils auront l’occasion de le découvrir.
Vous avez un abonnement ou une réservation en décembre ? Il y a plusieurs possibilités : (re)voir Sentiments provisoires, ou donner vos places, ou demander un remboursement ou en faire don au théâtre.
Quelque soit votre choix, nous ferons le maximum pour vous satisfaire.
Nous espérons pouvoir reprendre le cours normal de la saison après les fêtes. Fêtes que nous souhaitons douces et paisibles pour ajouter un peu de lumière dans cette bien étrange période.
Prix unique le 31 décembre à 16h & à 19h30 : 30€/pers
Une foule d’émotions drôles et émouvantes qui secouent les relations.
Avec
Nous retrouverons Catherine CONET dans Une liaison pornographique
& Nicolas DUBOIS dans Tout ce que vous voulez en décembre 2021
Mise en scène
Fabrice GARDIN réalisera la mise en scène de Karl Marx, le retour en janvier et de Tout ce que vous voulez en décembre 2021
Eclairage & Régie : Frédéric DELHAYE
Billetterie
Interview
Matthieu Delaporte et Alexandre de la Patellière sont nés en 1971. Scénaristes et réalisateurs, ils écrivent pour le cinéma et la télévision. « Tout ce que vous voulez » est leur troisième pièce, après « Le Prénom », grand succès qui restera dans les annales du théâtre et du cinéma. Et « Un dîner d’adieu ». Toutes trois créées au Théâtre Edouard VII et mises en scène par Bernard Murat.
Matthieu Delaporte et Alexandre de la Patellière en quelques dates : Rencontre en juin 1996. Première de la pièce le Prénom en septembre 2010. En 2012, sortie du film Le Prénom. En 2014, création de Un dîner d’adieu et sortie du film Un illustre inconnu. En février 2015, sortie du film Papa ou maman. En septembre 2016, première de la pièce Tout ce que vous voulez. Et en février 2020, Par le bout du nez
Fabrice Gardin à l’épreuve de Tout ce que vous voulez
- Qu’est ce qui t’a séduit dans ce texte ?
Au-delà du fait que c’est admirablement bien écrit, c’est sans doute le fait d’entrer dans la tête d’un auteur dramatique qui m’a semblé une idée intéressante. Analyser le processus de création d’une œuvre est toujours captivant, d’autant qu’ici Lucie mélange très fort la réalité et l’imagination.
Et puis, les auteurs ont eux l’intelligence d’englober ces questions dans une comédie romantique. Un genre que je n’ai pas encore vraiment abordé.
- Qu’est-ce qui t’a motivé à monter cette comédie ?
Une comédie romantique ne peut fonctionner que si les deux interprètes sont séduisants et si, dans la salle, le spectateur souhaite ardemment qu’ils finissent dans les bras l’un de l’autre. Je trouve ça vraiment excitant de faire rire avec des phrases merveilleusement bien écrites.
Les petits problèmes des auteurs de théâtre, leurs états d’âme et leurs angoisses, leurs hésitations et leurs solutions, les mises en abyme plus ou moins pirandelliennes, tout cela est très intelligent et fait avancer l’histoire de Lucie et Thomas.
Je pense à ‘La Nuit américaine’ de François Truffaut qui sut faire du tournage d’un film le sujet de l’un de ses meilleurs films. D’ailleurs, dans « Tout ce que vous voulez », le mari de Lucie s’appelle Ferrand comme le personnage de Truffaut dans ‘La Nuit américaine’…
- Que peux-tu dire sur les personnages ?
Lucie et Thomas vivent dans le même immeuble. Leurs appartements sont l’un en-dessous de l’autre. Et c’est un souci d’eau (la baignoire de Lucie débordant dans l’appartement de Thomas) qui les met en contact. Ils n’ont rien en commun et pourtant, ils vont peu à peu se rapprocher, faire de leurs points de divergence des atomes complémentaires, se séduire, s’éloigner, se fâcher, se retrouver. L’évolution de leurs sentiments est charmante et bien conduite.
Lucie est en panne d’inspiration, bloquée et cella la rend acariâtre, nerveuse et à fleur de peau.
Thomas est solaire, il a une sensibilité frémissante, une richesse dans le jeu, une grande subtilité dans l’expression, une présence évidente, il laisse affleurer une nature très attachante.
Géographes de l’amitié
Entretien avec Alexandre de la Patellière et Matthieu Delaporte
- L’avant-scène théâtre : Comment vous êtes-vous connus ?
Matthieu Delaporte : C’était il y a vingt ans. Je travaillais dans un studio au montage de mon premier court métrage. Par erreur, une assistante a envoyé les images sur tous les écrans de la société…
Alexandre de la Patellière : Assistant réalisateur à l’époque, j’étais ce jour-là, par un heureux hasard, dans le même studio. Sur les images en noir et blanc qui défilaient sur les écrans, on voyait le comédien Olivier Sitruk tenter en vain de se suicider dans une baignoire ! J’ai trouvé ça drôle et intrigant. J’ai alors remonté les couloirs du studio pour savoir qui était l’auteur de ce film… Je suis tombé sur Matthieu.
Matthieu Delaporte : Ce jour-là, on a commencé une conversation qui ne s’est jamais interrompue. Au cœur de notre amitié, il y a le cinéma, la passion des histoires. D’où tous les films que nous avons écrits ensemble.
- AST : Rien ne vous prédisposait à écrire pour le théâtre ?
M.D. : Nous avons toujours aimé le théâtre. Pendant longtemps nous n’avons sans doute pas osé nous y attaquer comme auteurs. Mais quand nous avons commencé à travailler sur le sujet du Prénom, ce dîner en huis-clos qui tourne à l’affrontement, il y a eu un sentiment d’évidence. Nous voulions sortir de la narration du montage, de l’ellipse. Au cinéma, une scène longue, c’est cinq minutes. On a eu envie de la lenteur, de la longueur, de la parole de la vie.
A. de la P. : On voulait aussi rester maîtres à bord de nos textes, retrouver le plaisir premier de l’écriture. Un scénario, tout le monde s’en empare. C’est un objet transitionnel mangé par le film… Quand on découvre le film terminé, c’est comme si on avait mis un enfant au monde et que d’autres l’avaient élevé !
M.D. : C’est le mot de Woody Allen : « Je fais de la mise en scène par légitime défense. » Le théâtre a été pour nous comme une thérapie, une thérapie très heureuse. Quand on a commencé à écrire Le Prénom, on n’avait aucune idée si on irait au bout et si la pièce serait montée un jour. On l’a fait pour nous et on s’est pris au jeu. La pièce terminée, c’est Isabelle de la Patellière, notre agent, qui a pensé à Bernard Murat.
A.de la P. : Pour nous, Murat, c’était une institution ! On ne savait pas quel homme c’était. On a rencontré quelqu’un de totalement passionné, d’une formidable jeunesse d’esprit. Nous avons su tout de suite que c’était le début d’une longue collaboration. Comme il est à la fois directeur, producteur et metteur en scène, ce qu’il promet, il le fait. On va tout de suite à l’essentiel ; c’est un travail passionnant.
- AST : Avez-vous écrit en pensant à des acteurs ?
M.D. : Nous n’écrivons jamais pour des acteurs. On pense parfois à des acteurs idéaux, des acteurs types, comme Cary Grant ! Mais la plupart du temps, nos personnages sont inspirés de la vie réelle, de nos amis, de notre entourage, de nous-même. Nous observons beaucoup, nous notons beaucoup, et nous volons beaucoup aux uns et aux autres !
AST : Comment écrivez-vous ?
A. de la P. : Nous sommes guidés par les histoires. Nous parlons d’abord beaucoup, comme des enfants qui mettent en place les bases d’un jeu. Chaque idée fait son chemin, on les laisse mûrir, on voit celles qui se développent et celles qui vont mourir. Deux sujets peuvent se rejoindre, comme c’est le cas pour le film qu’on a écrit, que Matthieu a réalisé, « Un illustre inconnu ».
M.D. : On nous demande parfois pourquoi l’on passe d’un scénario de film noir à une comédie. Très sincèrement, on ne sait pas. Nous allons là où le fil de nos histoires nous emmène.
A. de la P. : On cherche l’idée dans l’idée, la meilleure manière de traiter un sujet qui nous intéresse. Avant Le Prénom, nous voulions écrire à propos des places que l’on s’impose dans la famille, depuis l’enfance, et qu’on ne parvient jamais à quitter. L’idée de la naissance prochaine d’un enfant a été un déclencheur.
M.D. : Pour tous nos textes, il y a une longue phase de construction. Nous travaillons ensemble à un squelette très précis du récit. Le travail sur les dialogues ne vient qu’après, et c’est là que nous reprenons chacun notre liberté. Nous n’écrivons pas à quatre mains. Nous nous partageons les séquences, que nous concevons séparément, avant de les confronter et de les retravailler ensemble. Ça nous permet de rester les premiers spectateurs de nos histoires.
- AST : Il y a, dans vos pièces, une présence de la famille, des enfants, qu’on ne voit pas souvent au théâtre ?
M.D. : Sans doute parce que, dans nos vies, nous fonctionnons beaucoup en tribu. La famille, les amis que nous avons parfois depuis l’enfance, et aussi le travail – nous faisons nos films avec la même équipe depuis des années.
A. de la P. : Pour ce qui est des enfants, c’est vrai qu’on s’est souvent demandé pourquoi ils étaient si souvent absents des pièces contemporaines, alors que les enfants prenaient tant de place dans nos vies. Sans vouloir forcément refléter notre époque, nous voulions décrire un monde qui nous ressemble, avec ses propres obsessions, ses propres codes.
- AST : La mise au point de votre texte se prolonge-t-elle en répétions ?
M.D. : Une pièce, c’est un an de gestation et un an d’écriture. Quand arrivent les répétions, c’est un luxe merveilleux de pouvoir l’amender, le perfectionner avec de grands acteurs. Nous nous intéressons beaucoup au rythme du texte. Et ce n’est que quand la pièce se met debout que nous pouvons vraiment mesurer le travail qui reste à faire.
A. de la P. : L’écriture est très imprévisible. On écrit une ligne assez dure et droite, sans penser comédie ou drame. On découvre la pièce pendant les répétitions. Des choses font rire alors qu’on ne le pensait pas, mais l’inverse est aussi vrai ! Cette dernière phase d’écriture est fondamentale.
Propos recueillis par Gilles Costaz, L’Avant-Scène, n°1368.